On pourrait penser que le monde de la musique classique est frileux, old-fashioned, dépassé, sclérosé par des traditions qui toujours étonnent plus d’un novice en la matière. Et pourtant, la révolution digitale fait son œuvre, et tel que dans une symphonie, l’allegro vivace peut succéder à l’andante.
Certes, à l’instar de tous les autres pans de l’industrie musicale, le classique a et doit toujours compter avec la consommation illégale de musique, le piratage de DVD, la montée en puissance de Youtube. Pour autant le digital et son cortège de technologies et d’usages nouveaux constituent aussi de formidables opportunités que certains acteurs ont très tôt saisi.
La digitalisation des contenus a permis la rapide l’émergence de chaines spécialisées classiques dans différents bouquets (Mezzo), puis sont apparus des acteurs pure web tels que medici.tv. Pour autant, conscients de la possibilité de toucher directement ses publics et de désintermédier tout ce beau monde des diffuseurs et distributeurs, certaines institutions ont d’ailleurs lancé leur propre plateforme de live streaming ou de VOD, à l’instar du Wiener Staatsoper et son digital concert hall. On ne compte plus d’ailleurs les institutions lyriques ou orchestrales disposant de chaines Youtube ou dailymotion.
Un autre mouvement massif plus récent dans le secteur fut de capitaliser sur le renouvellement nécessaire de l’équipement des équipements de cinéma. Pour des raisons quelquefois très différentes, les grands opéras du monde ont donc commencé à investir les multi-complexes ou les gros cinémas des centres-villes. Le Metropolitan opera fut le premier, suivi rapidement par les autres maisons à dimension internationale (ROH, Opera de Paris, etc…). Et pour cause, de 2000 spectateurs (la capacité moyenne d’une grande salle d’opera va de 1700 à environ 3500 personnes) pour une représentation dans le theâtre lui-même, on se retrouve aisément avec une audience multipliée par 15-20 (35.000 ou 40.000) à en croire les chiffres avancés par certaines maisons. A 18-30 € le billet à l’unité, c’est une vraie piste de revenu à exploiter. « The world is a village”, le dit n’en a que plus d’acuité ! Les frontières s’amenuisent donc, le Metropolitan opera peut maintenant chasser sans complexe sur les terres parisiennes de l’Opera de Paris…et vice versa. Il n’y a plus de pré-carré…et les ressources des institutions doivent provenir de plus en plus de leur activité commerciales. En ces temps de disette budgétaire la subvention se fait rare…
Autre tendance de fonds qui voit les acteurs du secteur s’agiter pour placer leur pions : le mobile et la tablette. Ainsi applications relationnelles ou sites au format mobile se multiplient. Souvent bien faites, informationnelles, autorisant quelquefois le ticketing, ces applications, nécessaires, n’apportaient bien souvent, je dois dire, rien de bien exceptionnel en terme d’expérience client jusqu’il y a quelques jours…
En effet, la plus grande maison d’opera d’Europe, l’Opera de Vienne étonnamment discrète sur les réseaux sociaux (pas de compte twitter il y a encore quelques semaines !) vient de provoquer une vraie rupture d’expérience en lançant simultanément son offre de live en streaming, couplé à une expérience de second écran.
Une offre de streaming claire et enrichie par une expérience de second-écran :
2 types de contenus sont proposés par l’offre Wiener Staatsoper live stream : du vrai live pour 14 € (le spectacle) et de la VOD pour 5 € le titre à l’unité. Le contenu est accessible via le portail http://www.staatsoperlive.com sur tout pc compatible connecté à internet, donc à toute télévision ou rétro-projecteurs relié d’une manière ou d’une autre à un ordinateur ainsi que sur les smart TV Samsung les plus récentes. En revanche, ce streaming (live ou VOD), n’est disponible ni sur smartphone ni sur tablettes (et pour cause 🙂 )
Le live est diffusé avec les contraintes inhérentes à ce type de contenu (horaires fixés, entractes obligatoires, pas de possibilité de mettre sur pause, sinon c’est pas du live !!! etc…). Un demi-avant une présentation de l’opera est proposé et des rencontres à chaud, back-stage avec les artistes et autres membres du staff seront proposés à l’instar de ce qui se fait dans les lives transmis au cinéma.
Les contenus de VOD sont quant à eux consultables à loisir pendant les 7 jours suivant l’achat. Là aussi seulement du streaming, pas possible de télécharger la représentation acheté.
Dans les deux cas, le (télé?)-spectateur peut choisir deux vues à l’écran (une vue globale et impersonnelle de la scène ou celle filmée par un réalisateur) Mais là n’est pas la grande surprise de l’offre Wiener Staatsoper live stream. La petite révolution introduite par le Staatsoper est dans la possibilité d’utiliser sur android et iOS une application de second écran. Cette application à télécharger au préalablement permet de voir les surtitres de l’opera ou la partition elle-même défiler sur la tablette ou le mobile, au rythme du live ou de la VOD sur l’écran principal ! Juste un rêve ! La magie du watermarking ! Les langues disponibles sont pour l’heure l’anglais, l’allemand et …le Japonais, et oui ils sont pas fous les Autrichiens… mais on devrait avoir le français et d’autres langues disponibles rapidement…
J’en entends déjà murmurer « J’aime pas le classique, mais ça j’aime bien … 😉 »
“Wiener Staatsoper live stream : le second écran s’invite à l’Opéra de Vienne” by Ramzi SAIDANI is under terms and conditions of the licence Creative Commons Attribution 3.0 France
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Alain Altinoglu, vous êtes l’un des chefs d’orchestre français les plus demandés sur la scène lyrique internationale. Du Wiener Staatsoper au Metropolitan Opera, en passant par les salles lyriques de Paris où vous habitez, on profite avec bonheur de votre connaissance fine du répertoire français et italien qui suscite autant l’admiration du public que des orchestres que vous dirigez. On a pu vous voir tout récemment diriger « Un ballo in maschera » de Verdi dans le cadre des Chorégies d’Orange. Nourrissant également un vif intérêt pour le lied et la mélodie, vous formez un duo piano/voix avec votre épouse, la mezzo-soprano Nora Gubisch avec qui vous avez enregistré plusieurs CDs.
Suivant votre carrière musicale depuis quelques années, je me suis rendu compte que malgré toutes vos activités, vous étiez aussi très actif sur les réseaux sociaux tels que Facebook mais aussi sur Twitter bien avant qu’il ne se démocratise en France. Depuis quand utilisez-vous les deux réseaux sociaux phares que sont Facebook et Twitter ?
Je crois que je suis sur Facebook depuis 2008. Twitter , c’est beaucoup plus récent et d’ailleurs j’y vais moins souvent. Facebook me plait plus pour l’interactivité avec les « amis »!
On peut vous considérez-vous comme un « early adapter » dans un domaine d’activité qui renvoie peut-être à tort une image trop sérieuse sinon conservatrice. D’où vous vient cet attrait pour les réseaux sociaux ? Etes-vous friand en général de nouvelles technologies ?
Je suis assez friand de nouvelles technologies, je suis très curieux. Je pense que les réseaux sociaux correspondent tout à fait à notre époque . On est en contact à la carte. Les gens ne sont plus habitués aux compromis. Si ça les embête , il coupe. On ne fait pas ça dans la vie..pas encore !
Sur Twitter, on peut suivre votre série de photos de loges de toutes les grandes salles classiques et lyriques où vous avez dirigé. Comment vous est venue cette idée ?
Ce n’était pas calculé, j’ai juste posté une photo un jour d’une loge et j’ai trouvé ça marrant de comparer avec la deuxième et ainsi de suite. Et je vois que ça plait beaucoup à mes followers 😉
En plus de Twitter et Facebook, utilisez-vous d’autres réseaux sociaux,plus centrés sur la video, par exemple youtube ou Dailymotion ?
Je vais très souvent sur youtube, mais plutôt comme un moteur de recherche type google : pour apprendre, m’informer , etc.
Etre actif sur les réseaux sociaux peut prendre un temps précieux surtout pour quelqu’un d’aussi actif et occupé que vous. Quel est votre secret 🙂 ?
Justement, j’ai du temps en transit, dans les taxis, trains, etc…, j’alterne avec les livres et partitions et avec l’habitude, ça va très vite sur les réseaux sociaux où j’ai appris à être très réactif.
Gérez-vous vous-même vos comptes (facebook, twitter, etc.) ou bénéficiez de conseil ou de l’assistance de collaborateurs ou de proches ?
Je ne gère pas tout, quelqu’un (aidé d’autres) s’occupe de la page fan Facebook, et parfois mets à jour mes profils, mais je réponds personnellement aux fans.
Vous êtes-vous fixé des règles (temps maximum par semaine, pas d’utilisation de réseaux sociaux pendant les vacances, etc…)?
Il y a les règles d’acceptation d’amis sur facebook : pas d’extrémistes ! sinon, je fais au feeling. J’ai eu 2 semaines de vacances , loin d’internet, je n’ai pratiquement pas été sur un réseau social, et ça ne m’a pas manqué. J’ai arrété la cigarette en un jour, et je pense que je pourrais faire pareil avec les réseaux sociaux meme si jai l’air très addict!
Nombre d’artistes lyriques ou de grands musiciens ont une communauté de fans. Avant l’explosion de ces réseaux sociaux, les artistes pouvaient avoir des structures telles que des fans clubs qui géraient la relation par voie épistolaire et parvenaient par là-même à maintenir une certaine distance avec les fans. Avec le développement de réseaux communautaires favorisés par la révolution numérique, la proximité avec les fans ou les passionnés semblent beaucoup plus forte. Cherchez-vous et, si oui, comment parvenez-vous à tracer la frontière entre sphère privée et la sphère publique ?
Il y a parfois des gens qui confondent virtuel et réel. Ils se sentent une proximité plus grande qu’elle n’est en réalité. Il faut faire attention à ça au moment où on interagit avec les fans. Je ne crois pas que ça soit foncièrement différent dans la relation. Par contre, tout le monde est au courant plus vite. J’ai du mal à comparer avec avant, car je n’ai pas connu en fait.
Certains artistes se sont fait connaître grâce aux réseaux sociaux (Youtube ou naguère myspace) à l’instar de Valentina Lisitsia que d’aucuns appellent la « pianiste 2.0 ». Des artistes lyriques tels que Joyce DiDonato utilise leurs communautés via les services communautaires pour l’élaboration de son dernier CD. Pensez-vous que les réseaux sociaux sont désormais incontournables sinon importants pour tous les artistes et a fortiori les jeunes artistes commençant leur carrière. Vous-même, en tant que ‘jeune’ chef d’orchestre, diriez-vous que le volet « réseau social » compte désormais dans la gestion de votre carrière ?
Je ne crois pas que ça soit encore si important dans le domaine de la musique classique. On trouve des exemples dans les 2 sens. Des grandes carrières avec réseaux sociaux très développés ou parfois totalement absent ! J’ai un ami, très grand pianiste français qui joue partout dans le monde, qui n’a même pas encore de téléphone portable (les amis le reconnaitront 😉 ). Donc c’est possible.
Maestro, merci énormément pour cet échange ! Nous suivrons avec intérêt vos projets notamment Don Giovanni et Simon Boccanegra à Vienne et votre Werther au Met !
J’en profite pour rappeler :
-votre compte twitter : http://twitter.com/alainaltinoglu,
-votre page facebook officielle : https://fr-fr.facebook.com/AlainAltinogluOfficiel
-ainsi que votre site internet : www.alainaltinoglu.com
« Réseaux sociaux : le chef d’orchestre Français Alain Altinoglu nous livre sa vision » by Ramzi SAIDANI et Alain ALTINOGLU in under terms and conditions of the licence Creative Commons Attribution 3.0 France |
Il y a trois semaines, j’ai découvert un service de chorale virtuelle originale appelée e-Jam. Quelque temps après la 6ème biennale d’art vocal qui réunissait à Paris les meilleures formations chorales, c’est donc une autre approche du chant choral que propose le service e-jam. On ne pouvait que se réjouir de cette touche digitale qui permet de vulgariser et de démystifier encore plus le chant choral. Cela m’a intrigué ! Grâce à Céline Mounier, une collègue d’Orange France qui a été impliquée dans le projet (merci Céline!), j’ai pu rencontrer l’un des créateurs d’e-Jam. Et figurez-vous que l’un des cerveaux à l’oeuvre derrière le service n’est autre que le compositeur Jean-Marie LEAU ! Il m’a gentillement accordé la faveur d’un entretien dans un café du quartier de la Vache Noire à Arcueil !
Le compositeur Jean-Marie LEAU, l’un des créateurs de e-jam
Jean-Marie LEAU, vous êtes un compositeur reconnu. Votre fiche Wikipedia présente vos nombreuses créations. Vous avez notamment composé plusieurs contes musicaux tels que Sol En Cirque (paru chez Warner) avec Zazie et Vincent Baguian et en 2007, Aimé et la Planète des Signes, paru chez chez le célèbre label de musique classique Harmunia Mundi.
Existant sous forme la forme d’un site internet et également pour les détenteurs d’iPad et d’iPhone sous la forme d’une application, e-Jam est un service innovant qui combine le karaoké à l’esprit de chorale. En effet, avec e-Jam on peut s’entrainer à chanter des morceaux, s’enregistrer et combiner différentes interprétations pour former une chorale interprétant le morceau qui nous intéresse. Pour utiliser toutes les fonctionnalités du service, il faut créer un compte. On peut très simplement utiliser son compte facebook pour ce faire.
Le service web se présente sous la forme d’un site organisé autour de 3 onglets. Un onglet ‘Chansons’, un onglet ‘Jams’ et un onglet ‘Chorales’. Ces onglets correspondent à trois des fonctionnalités d’e-jam : le karaoke, la possibilité de s’enregistrer et de mettre à disposition des autres utilisateurs nos interprétations, et enfin la possibilité de créer ses propres chorales. Un catalogue de chansons est mis à disposition. On peut les apprendre en visionnant les vidéos où des coachs vocaux chantent pour nous.
E-jam est née en fait d’une chorale que j’ai créée il y a quelques années et qui s’appelle les « voisins du dessus ». Je me suis dis un jour alors que ca serait bien d’avoir à disposition un outil qui permettrait d’entretenir la mémoire d’un répertoire ou de créer un esprit de village autour de chansons à partager.
(i) En arrivant sur le site, une video d’accompagnement claire et efficace est proposée aux utilisateurs pour leur expliquer simplement comment fonctionne e-Jam.
(ii) La partie karaoké permet d’apprendre et répéter à loisir une chanson avant de créer son enregistrement. On peut donc s’entrainer avant de se lancer !
(iii) Comme e-jam nécessite une webcam, le service de modération est aussi un plus. Il permet d’éviter les mauvaises surprises de certains plaisantins 🙂
(iv) Le service existe aussi sous la forme d’une application pour iPhone, iPad
(v) Il est aussi possible de créer des chorales avec des VIP (les présentateurs de France 3 par exemple qui se sont prêtés aux jeux)
(vi) Enfin l’application web e-jam est bien intégré avec les réseaux sociaux les plus populaires tels que twitter et facebook.
(i) Le catalogue de chansons est encore restreint et exclusivement tourné vers de la variété alors qu’on peut imaginer aussi retrouver des classiques du chant choral avec plusieurs voix. nous souhaitons aussi pouvoir associer de nouveaux artistes et trouver, parmi la communauté des artistes, des ambassadeurs du service e-Jam !.
(ii) La mise à jour de certains composants du navigateur (applet java) peut rebuter certains utilisateurs pas très technophiles, nous travaillons à simplifier l’expérience utilisateur à ce niveau-là. Sur le mobile, on n’a pas ce souci !
(iii) Pour l’instant, il n’est pas possible de rentrer en contact avec les autres « e-Jammers » la dimension « réseau social » n’est pas encore exploitée jusqu’au bout, nous y travaillons ! Nous souhaitons également impliquer encore plus le spectateur et l’utilisateur. On imagine aussi démocratiser l’utilisation d’e-Jam en offrant par exemple à des groupes d’amis la possibilité d’offrir des jams par exemple à un ami enfance pour son anniversaire ou lors de fêtes de mariage !
Jean-Marie LEAU , merci beaucoup pour cette interview !
N’hésitez pas à télécharger l‘application sur l’appstore (il faut au minimum un iPhone 4) ou à utiliser l‘application web au lien suivant : http://www.ejam.fr. A lire également la communication de la société Big5Media qui a planché sur le design du service web et une partie du développement de l’application iOS.
« e-Jam : un service de e-chorale présenté par son créateur Jean-Marie LEAU » by Ramzi SAIDANI in under terms and conditions of the licence Creative Commons Attribution 3.0 France.
«Le Barbier de Séville», le célèbre opéra de Rossini que le maître de Pesaro composa lors de 24ème année en 3 semaines sera retransmis en direct de l’ Opéra de Lille le 18 mai (cool c’est mon anniversaire :). En plus de la Capitale des Flandres, Dunkerque, Armentières, Hazebrouck, Saint-Omer, Montreuil-sur-Mer, l’Athènes du Nord (Valenciennes) et leur cousine belge Courtrai pourront entendre retentir la célèbre cavatine de Figaro (Largo al factotum).
Les 9 représentations affichant complet, c’est une excellente idée de permettre à ceux qui n’ont pas eu de place de pouvoir en profiter d’aussi belle façon. Les quelque 10000 places disponibles des 9 représentations et de la générale (l’Opéra de Lille compte environ 1300 places) sont parties aussi rapidement que les vocalises de Rosina (on ne peut que s’en féliciter :).
L’utilisation des écrans avait déjà été explorée par l’Opéra de Lille en 2010. L’Opéra de Lille avait en effet diffusé gratuitement le chef-d’œuvre de Bizet Carmen (opéra le plus joué au monde) mais seulement à Lille et dans quelques villes alentours.
L’opéra-tion ( 🙂 ) autour du Barbier est en effet beaucoup plus ambitieuse. D’abord, le Nord ne sera pas le seul a profiter de ce Barbier et de la mise en scène plein de jeunesse de Jean-François Sivadier car on pourra entendre l’œuvre en direct aussi sur France Inter et la voir sur le site web d’Arte. Mais ce n’est pas tout, en complément des activités ainsi que de petits concerts autour de l’opéra de Rossini seront proposés aux Lillois et touristes de passage à la maison folie Beaulieu de Lomme. C’est aussi dans cette ville proche de Lille que l’oeuvre sera diffusée dans les 400 chambres de l’Hôpital Saint-Philibert. La musicoperathérapie !
C’est une belle opéra de communication pour la maison opératique lilloise qui compte parmi les plus dynamique opéras de province. Mais c’est aussi l’illustration d’un mouvement qui s’accentue : l’Opera cherche résolument à dépasser l’enceinte de son théâtre.
Complétement accessible en tout cas en province où dans une salle comme l’opéra de Lille, les places avec une visibilité pourtant correcte sont disponibles à 5 euros (moitié moins qu’une place de cinéma)., il n’y a juste qu’à faire montre d’un peu de curiosité pour découvrir un univers. Pour le très grand public qui quelque fois s’auto-censure, ne s’estimant pas à la hauteur de recevoir le cadeau merveilleux qu’est l’Art lyrique, les murs de pierres de taille des institutions lyriques peuvent s’apparenter à de vraies murailles.
Les diffusions en plein air en direct sont sans nul doute un formidable levier pour courtiser un nouveau public, plus large que les abonnés ou les habitués. Elles sont largement pratiquées par des institutions prestigieuses tels que le Wiener Staatsoper et le festival de Salzbourg, où des écrans sont régulièrement installés pour diffuser en direct des œuvres majeures du répertoire contribuent à convertir ainsi des milliers de touristes qui passe dans ces villes dévolues à la musique. La diffusion de live dans les opéras dans les cinémas peut également aider à passer le pas accéder à une expérience du lyrique.
Selon les dires de la directrice de l’Opera de Lille Caroline Sonrier, reportés dans la Voix du Nord, un tiers des personnes assistant à la diffusion de Carmen n’avaient jamais vu auparavant un opéra en direct. Le choix lillois du Barbier comme de Carmen en 2010 n’est pas un hasard : ce sont des œuvres universelles, très accessibles. Qui ne connait pas un air de Carmen..?
La toile n’est cependant pas le seul moyen d’intéresser au 6ème art. Certaines villes proposent par exemple des parcours découvertes de la ville autour de 3 opéras. En particulier Séville offre à ses nombreux touristes des itinéraires ayant pour thème les lieux justement où se déroulent 3 des operas majeurs du répertoire qui se passent dans la capitale andalouse (Carmen, le Barbier de Séville justement et Don Giovanni)
La diffusion d’opéra dans des lieux mythiques tels que les arènes de Vérone où au pied des célèbres pyramides d’Egypte attirent des touristes souvent d’abord davantage intéressés par le lieu (contenant) que le contenu.
Les flash mobs sont également largement sollicités dans le monde de la musique classique, comme l’illustrent ce chœur des esclaves de Nabucco sur une place de Grenoble, cette Ode à la Joie sur une place espagnole de Sabadell (ville du nord-est de l’Espagne).
L’opéra de Rennes proposera en juin 2013 une expérience d’opéra sur tablette innovante grâce au partenariat technologique d’Orange. La fondation Orange est d’ailleurs l’un des partenaires de la diffusion du Barbier de l’Opéra de Lille (Voir mon article d’avril à ce sujet)
Le digital, du mobile et de ses applications peuvent en effet être astucieusement utilisés pour attirer l’attention, susciter l’intérêt et développer le désir et provoquer l’achat, selon la bonne vieille méthode AIDA, tiens encore un autre opéra 🙂 . C’est tout l’objet justement de opera-digital.com que de vous faire découvrir ce que pourront être les expériences du lyrique et la musique classique de demain.
Largo al factotum della città…
L’Opéra de Lille prend l’Air de Ramzi SAIDANI est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution 3.0 France.
L’objectif de la stratégie de la distribution multicanale consiste à toucher la clientèle potentielle à travers le plus grand nombre de points de contact. On peut ainsi vendre un kit dans les boutiques physiques sur le net, depuis son mobile, sa tablette bientôt son réfrigérateur, ou encore par le biais du télé achat, etc…. Les différents canaux coexistent en général et certaines différences sont maintenues pour éviter la trop forte compétition voire la cannibalisation entre eux.
Le marché de la musique a été servi par un nombre important de procédés technologiques : rouleaux, vinyles, cassettes, CD, radio, DVD, blue-ray, radio, télé, musique dématérialisée à télécharger ou en streaming. Si tous ces mécanismes ont permis à la musique d’exister en différé, seuls certains peuvent prétendre lui ouvrir le monde du direct. Il était ainsi possible de vivre en direct via l’apparition de la radio et de la télévision, un certain nombre d’évènements en particulier d’évènements culturels ou sportifs si l’on n’avait pas la chance ou le porte-monnaie pour les vivre in situ. L’expérience du direct est donc elle aussi devenue multi-canale : du spectacle in situ au visionnage et/ou à l’écoute d’un des médias traditionnels.
Mais la digitalisation révolutionne moult secteurs, en y venant accroître le nombre de canaux disponible. En ce qui concerne le 4ème Art (Musique) et le 6ème Art (les arts de la scène en particulier l’hybride opera) n’échappe pas à ce constat. A ce titre, après avoir été multi-support, le marché de la musique devient aussi de plus en plus multi-canal dans l’expérience du direct. En plus de la radio (France Musique en autres) , de la télévision (Mezzo bien évidemment ou des chaines généralistes comme Arte ou France Télévision), de nouveaux modes de distribution du direct font leur apparition : tout d’abord la web TV (sur PC, webphone ou tablette) et la toile, l’autre, albe et tendue comme la misaine de l’Indomptable de Billy Bud.
Des maisons d’opera proposent désormais de voir sur leur site web l’intégralité de certaines productions. On peut citer par exemple l’Opéra Royal de la Monnaie (magnifique production des Huguenots) ou l’Opéra de Paris (le merveilleux Werther de Kaufmann avant sa sortie en DVD). Mais ce sont toujours des rediffusions, on peut rarement regarder en direct ces représentations, on est souvent plus dans une logique de VOD gratuite ou de replay. Pourtant en France certains acteurs tels que Medici.TV permettent de voir des spectacles notamment de l’opera en direct (pour info, le prochain direct est un concert du New York Philarmonic à Dresde le 14 mai), et ce en plus d’un riche catalogue de videos à la demande (représentations en rattrapage/catch-up ou plus anciennes).
Cet acteur pur web propose en effet une web TV qui permet de regarder en direct et en différés des spectacles de musique classique sur son l’ordinateur, son téléphone mobile et sur tablettes (applications disponibles pour Android et iOS) et sur certains modèles de Télévisions connectées intelligentes.
Depuis 2006, c’est aussi l’écran de cinéma qui vient proposer aux amateurs de musique de vivre une expérience de direct en particulier d’opera en direct. Le premier à avoir exploré la piste du cinéma et de la diffusion en direct dans les grands multiplex fut le Metropolitan Opera à New York. Depuis entre autres, beaucoup plus récemment, Covent Garden ou l’Opéra National de Paris l’ont suivi.
Le Metropolitan Opera : en direct et en HD est une initiative du célèbre théâtre lyrique new-yorkais (doté d’une capacité de 3800 places) pour retransmettre certaines de productions, en direct et HD dans des salles de cinéma de plusieurs pays du monde depuis 2006. Pour la saison 2012-2013, 12 opéras sont présentés en direct dans près de 1900 salles reparties dans 64 pays dont le Qatar, la Chine et l’Egypte, la Russie ou le Mexique !
Pour les maisons d’opéras, le cinéma offre la possibilité de toucher un nombre plus important de spectateurs en leur fournissant une expérience plus riche. Les surtitrages sont disponibles dans la langue de la salle de cinéma contrairement au théâtre physique où seule la ou les langues (Bravo la Belgique;) du pays d’appartenance de la maison sont proposées, avec l’anglais le plus souvent, s’il reste de la place sur les écrans de surtitrage.
Les représentations sont souvent complètes plusieurs semaines avant même si les places sont nettement plus chères qu’une place de cinéma même 3D. Bien que cela se passe au cinéma, l’écosystème commercial mobilisé conserve énormément des caractéristiques des institutions de l’art vivant. Une certaine forme de rareté existe donc. On peut réserver son « billet » très en avance en commandant en ligne sur certains sites spécialisés, sur les réseaux de cinéma ou dans certains réseaux distribuant des billets de spectacles comme la FNAC. Des abonnements existent où l’on peut voir 5 ou 10 opéras de la saison avec des prix dégressifs. Ces abonnements n’ont rien à voir avec les cartes d’abonnement UGC ou Gaumonts pour lesquels on ne connait pas à l’avance le film que l’on va regarder.
Les amateurs d’opéra en direct ont donc le choix entre un plus grand nombre de possibilités pour vivre à plein leur passion dévorante. Et ce n’est pas pour me déplaire pourtant autant on peut s’interroger sur la coexistence de ces canaux et de leur synergie… La digitalisation modifie quantitativement mais aussi qualitativement et la nature de l’interaction entre ces derniers canaux…
Opera en direct : de la Toile à la toile pour nos étoiles…de Ramzi SAIDANI est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution 3.0 France.